Etude anatomo-chirurgicale de 41 jonctions sapheno-poplitées incontinentes. Peut-on réduire le risque de récidive variqueuse poplitée ?

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Etude anatomo-chirurgicale de 41 jonctions sapheno-poplitées incontinentes. Peut-on réduire le risque de récidive variqueuse poplitée ?

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RESUME

Afin d’évaluer le risque d’insuffisance d’exérèse chirurgicale nous avons réalisé une étude anatomo-chirurgicale peropératoire prospective de 41 patients présentant une incontinence de la petite saphène. L’étude anatomique de la jonction saphéno-poplitée incontinente a montré : 78 % de jonctions situées dans la fosse poplitée entre 0 et 5 cm, 12 % de jonctions hautes entre 8 et 16 cm, 9.7 % de jonctions basses. Ces chiffres correspondent à ceux des différentes séries réalisées chez le patient variqueux, mais ces chiffres sont significativement différents de ceux des séries réalisées chez le patient sain. Ce qui amène à conclure que les jonctions incontinentes sont surtout les jonctions basses. Les jonctions complexes ou latérales sont aussi plus fréquentes dans les jonctions basses. La présence de collatérales de la jonction saphéno-poplitée dans 92% des cas permet d’expliquer la fréquence des récidives sur moignons longs. Des jonctions complexes tortueuses semblables aux perforantes de la fosse poplitée ont été mis en évidence dans 29% des cas. Cette similitude permet peut être d’expliquer la fréquence parfois importante dans certaines séries de récidives apparaissant sous l’aspect de perforantes de la fosse poplitée. L’excellente corrélation écho-chirurgicale, ainsi que la plus grande fréquence de jonctions incontinentes situées justement dans la zone chirurgicale facilement accessible, permet de montrer qu’un examen écho-doppler préopératoire systématique, et une intervention d’exérèse adaptée et complète permettrait d’éviter toutes les récidives par insuffisance d’exérèse.

INTRODUCTION

S’il est vrai que les récidives variqueuses après chirurgie de la petite saphène ont une mauvaise réputation, tout d’abord au plan clinique par la brutalité de leur apparition, et par leur mauvaise tolérance, elles ont aussi une mauvaise réputation chirurgicale par leur difficulté de traitement et par leur tendance, malheureusement à être multi récidivantes. Aucune donnée de la littérature ne précise de façon claire ce pourcentage de récidives VASDEKIS [1] donne 1.8% de récidives, TREMPE [2] donne 48 % de récidives et RIVLIN [3] donne 8 % de récidives après 5 à 10 ans sur 285 patients. La disparité de ces chiffres traduit, dans ces séries l’inhomogénéité des données hémodynamiques préopératoires. Seule, l’étude récente de MILDNER [4] rapporte, sur 150 cas avec un suivi de 5 ans, 23.5 % de récidives après ligature sous fasciale de la petite saphène, sans résection complète de la jonction saphéno poplitée. Par contre depuis longtemps, la malfaçon chirurgicale, l’insuffisance technique ou insuffisance d’exérèse ont été clairement mis en cause dans l’apparition des récidives [5-11].

Afin de comprendre et d’évaluer ce risque d’insuffisance d’exérèse, nous avons réalisé une étude anatomochirurgicale prospective sur 41 patients consécutifs, présentant une insuffisance de la petite saphène.

ANATOMIE CHIRURGICALE DE LA JONCTION SAPHENO- POPLITEE INCONTINENTE

1 / MATERIEL ET METHODE

L’étude a consisté en l’analyse d’une série anatomique opératoire de 41 jonctions saphéno poplitées incontinentes consécutives, pour lesquelles l’indication d’un abord de la fosse poplitée était posée. La dissection a été réalisée à l’aide de loupe binoculaire de grossissement 3.5. Les mensurations et le schéma de la jonction ont été colligés en fin d’intervention. Ont été noté, la hauteur de l’abouchement par rapport au pli poplité, la face d’implantation sur la veine profonde, la forme de la jonction, la situation et le nombre des collatérales, la longueur de l’incision transversale ainsi que sa hauteur par rapport au pli poplité. 41 patients ont été opérés entre novembre 97 et février 98, après un examen écho Doppler codage couleur sonde 7.5 Mhz (Hitachi EUB 555) et un échomarquage réalisé avec un Esaote AU 530 sonde 10 Mhz réalisé juste avant l’intervention.

Nous avons utilisé la classification de KOSINSKI [12] qui a le mérite d’être simple et intéressante du point de vue chirurgical.

Le type I représentait les jonctions situées au niveau de la fosse poplitée entre 0 et 5 cm au-dessus du pli poplité.

Le type II représentait les jonctions hautes situées au-delà de 5 cm (12cm), hors de la fosse poplitée, avec un abouchement principal, fémoral, musculaire, sciatique ou dans la grande saphène par l’intermédiaire d’une veine de Giacomini.

Le type III représentait les jonctions basses situées en dessous du pli poplité.

Les comparaisons des distributions indépendantes ont été réalisées par le test de khi 2, le degré de significativité a été donné par p.

2 / RESULTATS

Les 3 types de jonction étaient répartis selon le Tableau I :

Tableau I : Comparaison des hauteurs d’abouchement de la Petite Saphène continente et de la Petite Saphène incontinente
Sujet sain Incontinence Petite Saphène
n = 628 [ 12, 15, 16, 18] n = 1551 [ 20-27] n = 41[ série personnelle ]
type I
fosse poplitée
60 % (a) 78 % (a) 78 %
type II
jonction haute
32 % (y) 15 % (y) 12.1 %
type III
jonction basse
7 % (j) 5.6 % (j) 9.7 %

Comparaison en méta-analyse des séries groupées (a ) et (Y ), différence significative (p < O.O5). Comparaison en méta-analyse des séries groupées (j ), différence non significative.

78 % des cas étaient des jonctions de type I situées entre 0 et 5 cm (32), parmi elles 9 abouchements étaient situés sur la face latérale de la veine poplitée. 18 étaient des abouchements droits tubulaires, et 9 des abouchements tortueux de type complexes.

12,1 % des cas étaient des jonctions hautes de type II , entre 8 et 16 cm (5), toutes étaient des jonctions droites tubulaires.

9,7 % des cas étaient des jonctions basses de type III situées au-dessous du pli (4), deux étaient complexes. L’existence d’un tronc commun avec les veines jumelles a été retrouvée 13 fois, et 12 fois sur un abouchement situé entre 0 et 3 cm au-dessus du pli poplité.

  • 29 fois la jonction saphéno poplitée était simple, représentée par une veine régulière, rectiligne, dirigée obliquement d’arrière en avant, et de bas en haut vers la veine poplitée, avec une paroi épaisse d’aspect et de consistance lisse identique à celle de la petite saphène. Tableau II.
  • 12 fois la jonction saphéno poplitée située entre le tronc de la petite saphène et l’abouchement poplité était complexe, représentée par une veine tortueuse, décrivant des courbes sur elle-même, souvent engainée dans de la graisse, et longée par des artérioles. Ce type de jonction était souvent anévrismal, et à la paroi très fine. Une fois, cette dilatation anévrismale communiquait avec la poplitée par 3 abouchements différents (figure 1). Les trajets complexes étaient tous situés entre 0 et 5 cm au-dessus du pli poplité (Tableau II) (Tableau III).
  • 9 fois l’abouchement était situé sur la face latérale de la veine poplitée et 32 fois sur la face postérieure. Tous les abouchements latéraux étaient situés entre 0 et 5 cm (Tableau II) (Tableau III).
  • Les collatérales de 1 mm étaient souvent rectilignes et se jetaient habituellement dans la graisse de la fosse poplitée sans relation particulière visible avec les veines profondes ou musculaires. Elles ont été retrouvées dans 92 % des cas au nombre de 2 à 3 par jonction.
  • Les collatérales de 2 mm ou plus suivaient des trajets identiques et ont été retrouvées dans 88 % des cas au nombre de 1 à 2 par jonction. Elles étaient plus fréquentes dans les jonctions hautes de type II où elles représentaient le mode de terminaison de la petite saphène souvent trifurqué.
  • L’absence de veine de Giacomini a été constatée dans 14 % des cas.
  • Toutes les incisions réalisées pour ces exérèses ont été faites transversalement entre le pli poplité et une ligne située 8 cm au-dessus du pli poplité. La longueur variait de 25 mm à 35 mm en fonction, surtout, de la corpulence du membre.
Tableau II : Comparaison des hauteurs d’abouchement de la Petite Saphène continente et de la Petite Saphène incontinente
£ 5 cm ³ 5 cm
Trajet rectiligne 29 58,5 % 24 5
Trajet complexe 12 29,2 % 12 0
Abouchement postérieur 32 78 % 27 5
Abouchement latéral 9 21.9 % 9 0
Abouchement médial 0 0 0
Tableau III

Figure 1

3 / DISCUSSION

Si la classification de MERCIER [13] et PAYEN [14] décrit précisément l’ensemble des différentes possibilités d’abouchement de la petite saphène dans la voie profonde, elle est, par contre, peu adaptée à la description pratique des indications chirurgicales. D’autres classifications ont été utilisées [15] [16] [2] et certaines plus récentes [17] [18] [19] sont d’intérêt plus chirurgical.

Malgré la grande diversité théorique d’abouchement de la petite saphène dans la voie profonde, on constate que 88% ont été facilement accessibles par une incision transversale habituelle de 3 cm situées au voisinage du pli poplité. Seulement 4 abouchements hauts ont nécessité une incision transversale plus haute (jusqu’à 8 cm au-dessus du pli poplité), mais qui n’a pas posé de difficulté particulière. Il faut remarquer que la plupart des grandes études anatomiques de la jonction saphéno poplitée (Tableau I [20-26]) ont été faites sur des dissections anatomiques concernant des sujets sains CIBOR [16], KOSINSKI [12], MOOSMAN [15], ou plus récemment ENGEL [18] sur un groupe de sujets sains explorés par échodoppler. Ces études de la jonction saphéno-poplitée continente donnent environ 30 % de jonctions hautes de type II, alors que les mêmes études anatomiques faites sur des patients variqueux présentant une jonction saphéno-poplitée incontinente ne donnent que 15 % de jonctions hautes, chiffre assez voisin des 12.1 % retrouvés dans cette série personnelle. La même différence existe entre les études réalisées chez les patients sains et chez les patients variqueux concernant les jonctions situées en fosse poplitée (type II) ; 60 % en moyenne chez les sujets sains et 78% chez les sujets variqueux (78 % dans notre série). Les comparaisons en méta-analyse de ces différentes séries montrent que les pourcentages de chaque série sont significativement différents (p < 0.05). Cela signifie que les jonctions situées entre 0 et 5 cm du pli poplité sont plus fréquemment incontinentes que les jonctions hautes.

Le grand nombre de collatérales saphènes proche de l’abouchement explique, certainement, en partie le risque de récidive lorsque l’exérèse est faite à distance de l’abouchement laissant un moignon long incontinent. Dans cette étude, la jonction saphéno-poplitée présentait en moyenne 3 à 5 collatérales au voisinage de l’abouchement. RETTORI [27] a mis en évidence 35% de collatérales de la convéxité incontinentes sur 123 explorations chirurgicales.

La grande fréquence de la veine de Giacomini (86%) justifie qu’elle soit marquée, systématiquement, durant la cartographie préopératoire.

La fréquence relativement grande (29%) des jonctions saphéno poplitées complexes explique, peut être, le nombre parfois important de récidives poplitées apparaissant sous la forme de perforantes fosse poplitée, 10 % pour MILDNER [4], 12.5 % dans notre expérience [28] Les seules récidives constatées chez les patients ayant eu un examen écho Doppler préopératoire et une exérèse petite saphène complète étaient représentées par des veines perforantes de la fosse poplitée. Dans ces cas, le moignon long résiduel sur une jonction saphéno poplitée complexe prend exactement l’apparence d’une perforante de la fosse poplitée. La difficulté de dissection de ces jonctions saphène poplitées complexes pourraient d’ailleurs expliquer la fréquence de ces insuffisances d’exérèses et le développement de ces moignons longs sous la forme de pseudo perforantes de la fosse poplitée. Dans ces formes complexes où la représentation graphique dans l’espace est pratiquement impossible, l’examen écho Doppler de la jonction saphéno-poplitée demande une attention particulière. La mémorisation préopératoire dans l’espace de la jonction saphéno-poplitée est souvent la seule aide possible pendant la dissection de ces jonctions saphéno-poplitées complexes. Il est indispensable que cet examen soit fait en présence de l’opérateur, le plus près possible de l’intervention. Dans notre expérience avec cette attitude, nous avons toujours eu une très bonne corrélation entre les constatations opératoires et l’anatomie échographique. L’association d’une incontinence de la petite saphène et d’une perforante de la fosse poplitée n’a pas été retrouvée dans cette série ( 9.8% des cas dans la série de RETTORI [27]).

Comme dans la série de LEMASLE [25], l’existence d’un tronc commun des veines jumelles et d’autant plus fréquente que la jonction est basse entre 0 et 3 cm au-dessus du pli, ce qui est favorable à une exploration chirurgicale aisée. Nous n’avons pas trouvé de petite saphène présentant un double abouchement (7% des cas sur 4500 dissections [29]) ni de dédoublement de la petite saphène au tiers supérieur du mollet (18% des cas [30]). Au total, cette étude anatomique montre que globalement l’anatomie chirurgicale de la petite saphène incontinente est d’accès relativement facile.

COMMENT LIMITER LE RISQUE DE RECIDIVE APRES CHIRURGIE DE LA PETITE SAPHENE INCONTINENTE ?

1 L’insuffisance veineuse profonde.

L’exérèse de la petite saphène incontinente dans le cadre d’une insuffisance veineuse profonde expose au risque de récidive, que ce soit dans le cadre d’une insuffisance veineuse profonde primitive ou secondaire. SOMJEN [31] a montré qu’un reflux situé dans la veine poplitée, étendu plus ou moins haut sur la veine fémorale, pouvait être induit par l’incontinence de la petite saphène, et pouvait être réversible après résection de la petite saphène. Par contre, pour d’autres auteurs [32] [33], l’insuffisance veineuse profonde est un facteur d’induction de l’incontinence de la petite saphène. Dans la série d’ ALMGREN [34], 3.5 % de reflux étaient constatés sur un groupe de patients sains, et 42.9 % de reflux, surtout poplités, étaient constatés sur un groupe de patients porteurs de récidive variqueuse. Pour cet auteur, l’insuffisance veineuse profonde semble induire aussi bien l’apparition de varices que celle des récidives. La fréquence de l’insuffisance veineuse profonde associée à la présence de varices est évaluée entre 9.6 % et 40 % [35-40], et plus récemment avec une fréquence de plus de 45% [41]. Même si certain biais de recrutement ou méthodologique explique la disparité et l’importance de certain de ces chiffres, la recherche d’une insuffisance veineuse profonde dans le bilan d’une insuffisance veineuse superficielle ou d’une récidive est indispensable. Elle s’établit sur les bases de l’anamnèse, de l’examen clinique et doit s’appuyer sur un examen écho Doppler complet de la voie profonde. L’association d’une insuffisance petite saphène et d’une insuffisance veineuse profonde nécessite impérativement la prise en charge de l’insuffisance veineuse profonde, soit par la compression élastique continue ou par la réparation chirurgicale veineuse profonde.

2 Origine du reflux tronculaire petite saphène.

La première obligation est de définir précisément l’origine du reflux tronculaire petite saphène. Le reflux peut venir de la grande saphène par l’intermédiaire de la veine de Giacomini sans qu’il existe de communication entre la petite saphène et la veine poplitée. Dans ce cas, aucun abord chirurgical de la fosse poplitée ne se justifie. Le reflux peut venir de la veine poplitée ou de la veine fémorale basse, ce qui justifie l’abord chirurgical de la fosse poplitée.

3 Imagerie de la jonction saphéno poplitée.

Actuellement la fiabilité des appareils echodoppler est suffisante pour que cet examen soit le seul nécessaire et suffisant pour visualiser avec précision la jonction saphéno-poplité. De nombreuses études ont démontré la bonne corrélation écho-chirurgicale de cet examen anatomique [25] [42]. Sur une étude précédente des réinterventions pour récidives poplitées [28] nous avons montré que dans notre expérience toutes nos réinterventions personnelles pour insuffisance d’exérèse concernaient des patients opérés sans examen échographique préopératoire. Afin de réaliser l’exérèse de la petite saphène dans sa totalité, il est indispensable de définir précisément l’anatomie de la jonction saphèno poplitée par un examen échodoppler préopératoire à visée chirurgicale où les coupes doivent être réalisées sur un mode systématique précisant tout d’abord :

  • Le tronc incontinent de la petite saphène avec sa position sous-cutanée, ses relations avec l’aponévrose superficielle et surtout son point de pénétration, la limite de reflux inférieur (où il existe une brusque différence de diamètre souvent à l’emplacement d’une collatérale interne), un éventuel dédoublement tronculaire, et surtout la limite la plus supérieure d’accessibilité du tronc avant son infléchissement antérieur. Ce point d’infléchissement antérieur doit être impérativement matérialisé sur la peau. Dans notre expérience [43], entre 1993 et 1996, sur 329 incontinences de la jonction saphèno poplitée, l’incontinence complète du tronc saphène représentait seulement 8.8%, dans la série de KOYANO [44], sur 70 cas, 52.9 % étaient des incontinences complètes du tronc saphène, 17.1 % des incontinences des 2/3 supérieurs, et 28.6 % des incontinences du tiers supérieur.
  • Le point d’abouchement de la petite saphène dans la veine profonde doit être connu, sa projection sur la peau ainsi que sa profondeur par rapport à la surface cutanée doivent être matérialisés. La face d’implantation sur la veine poplitée doit être définie et matérialisée sur le marquage préopératoire. Si la précision entre une implantation latérale, antérolatérale ou antérieure n’est pas fondamentale, il est, par contre, très important de noter si le mode d’abouchement est latéral ou médial, c’est à dire si la petite saphène avant son abouchement se dirige en dedans ou en dehors de la veine profonde.
  • Le trajet intermédiaire entre le point d’abouchement de la petite saphène dans la veine profonde et le point d’accessibilité le plus haut du tronc saphène est souvent le plus difficile à définir et pourtant le plus important. Dans le meilleur des cas il est rectiligne entre le point le plus haut d’accessibilité du tronc saphène et l’abouchement. Il est parfois en baïonnette avec une première portion infléchie à 90° en avant vers la profondeur et une deuxième portion verticale, suivant parallèlement la veine profonde vers le haut avant son abouchement. Ces cas sont d’exploration chirurgicale plus difficile. Le trajet intermédiaire est parfois complexe sans aucune systématisation, l’importance d’un dessin préopératoire est essentielle. L’image échographique en 3D reconstruite par ordinateur pourrait trouver, ici, toute sa valeur à défaut pour l’opérateur de pouvoir mémoriser lui-même l’anatomie échographique avant l’intervention.
  • Il est essentiel de marquer sur la peau le trajet de la veine de Giacomini qui est toujours une veine superficielle facilement accessible. C’est le guide le plus sûr pour trouver la petite saphène lorsque, reconnue, elle est suivie de haut en bas vers le tronc de la petite saphène.
  • Le type de confluent avec les veines jumelles doit être reconnu [42] : type A abouchement séparé, type B abouchement commun, type C tronc commun, type D autres.

4 Principes de l’intervention.

Ils doivent être guidés par le respect de trois impératifs :

  • réaliser une exérèse totale de la petite saphène incontinente
  • limiter au maximum les hématomes et les phénomènes de cicatrisation, sources théoriques d’angiogénèse par une intervention la moins délabrante possible
  • limiter le risque thrombo embolique post opératoire source de récidives par lésion de la voie profonde

La dissection est d’autant moins agressive et délabrante que la visualisation préopératoire échographique de la jonction saphéno poplitée aura été plus précise. Dans ce cas la dissection peut porter uniquement sur la jonction saphéno poplitée. C’est à dire que l’examen écho Doppler préopératoire permet d’éviter l’exploration chirurgicale large de la fosse poplitée. Pour respecter ces impératifs, l’intervention est réalisée en décubitus ventral, genou légèrement fléchi, sous anesthésie locale pour éviter la vasoplégie peropératoire responsable de saignement et d’hématome post-opératoire plus important. L’incision horizontale de 35 mm maximum est centrée juste au point d’inflexion du tronc saphène à son extrémité supérieure et la dissection est menée à l’aide de loupe binoculaire de grossissement 3,5 au plus près de la petite saphène de la superficie vers la profondeur. Les collatérales sont sectionnées sur clips, les lymphatiques, artérioles et nerfs sont protégés. La ligature est faire au ras de la poplitée. Nous avons l’habitude de lier le moignon par un nud de vicryl sans traitement particulier du moignon. Certains moyens peuvent être utilisés pour limiter le risque d’angiogénèse : les lèvres du moignon peuvent être suturées par un surjet de prolène [45], l’endothélium du moignon peut être micro coagulé, le moignon peut être enfoui par un surjet de prolène ou recouvert par un patch d’isolement [46].

Mais aujourd’hui, bien que ces moyens de prévention de l’angiogénèse soit largement utilisés, l’efficacité à long terme d’aucune de ces techniques n’a été évaluée. Dans le même esprit d’isolement de la zone opératoire, il parait nécessaire de refermer l’aponévrose. Dans notre expérience l’angiogénèse paraît moins fréquente qu’au niveau inguinal, peut être du fait de la profondeur du moignon et de

l’éloignement des structures lymphatiques.
L’exérèse complète du tronc saphène incontinent est un principe essentiel pour limiter le risque de récidive. Nous avons l’habitude d’utiliser le Pin Stripper introduit de haut en bas jusqu’au point d’arret de l’incontinence et de réaliser un stripping strictement par invagination de haut en bas. En effet l’existence d’un tronc résiduel incontinent de la grande ou de la petite saphène est un facteur de récidive [47]. De même, l’ablation incomplète des collatérales saphènes, ou la présence de varices résiduelles favorisent par le reflux, le développement de nouvelles communications veineuses profondes vers le haut. C’est la raison pour laquelle il nous paraît essentiel de réaliser l’exérèse variqueuse complètement en même temps que l’exérèse de la petite saphène incontinente.

L’utilisation d’HBPM post opératoire parait particulièrement indiquée dans la chirurgie de la petite saphène pour prévenir le risque de complication thrombo embolique. En effet ce risque thrombo embolique est significativement plus important dans la chirurgie de la petite saphène [48]. Dans cet esprit, la chirurgie ambulatoire, attitude systématique dans notre expérience, devrait permettre de réduire encore ce risque thromboembolique.

La compression élastique postopératoire de 20 mm de mercure pendant 30 jours minimum, semble pouvoir réduire aussi le risque de récidive. TRAVERS [49] a montré que le port d’une compression élastique pendant 9 mois post opératoire, réduisait le taux de récidives de 71 % à 6 % après un an. L’amélioration de la micro circulation dans les vasa vasorum veineux par la compression pourrait expliquer la diminution du risque de récidives [50].

RESULTATS DE LA CHIRURGIE DE L’INCONTINENCE PETITE SAPHENE

Plusieurs études [51] [24] ont montré que l’insuffisance d’exérèse du tronc saphène incontinent était un facteur de mauvais résultats, et d’autres [2] [52] ont montré que l’insuffisance d’exérèse de la jonction saphéno poplitée était la cause de 72 % de récidives variqueuses poplitées. De façon plus précise, sur une série de 150 exérèses incomplètes revues après 5 ans, MILDNER [4] a montré que l’exérèse incomplète de la petite saphène avec persistance d’un moignon long était responsable de l’apparition d’une récidive sur le moignon dans 13,5 % des cas. D’autres [53, 54 ] ont montré que la simple ligature de la petite saphène sous fasciale donnait environ 30% de récidive. Ces différentes études montrent que l’exérèse complète de la petite saphène devrait pouvoir faire disparaître ce type de récidives et faire baisser le pourcentage de récidive.

Le développement d’une incontinence sur perforante de la fosse poplitée traduit certainement l’existence de phénomène hémodynamique particulier du confluent veineux profond du genou. C’est certainement le dernier facteur non maîtrisable malgré une indication opératoire bien posée et une technique opératoire complète.

CONCLUSION

Le fait que la jonction saphéno poplitée incontinente soit significativement plus fréquemment située au voisinage du pli poplité, et que l’imagerie ultra sonore préopératoire puisse actuellement définir parfaitement la jonction saphéno poplitée devrait permettre de faire disparaître beaucoup de récidives dues à des insuffisances d’exérèse. La précision des données échodoppler, habituelle aujourd’hui, devrait aussi permettre de réduire la morbidité opératoire de cette exérèse qui doit être complète. Cette nécessité d’exérèse ne doit pas pour autant compromettre les qualités de l’intervention car d’une part, l’exérèse complète n’est pas une garantie totale d’absence de récidive, en effet le développement d’une incontinence sur perforante de la fosse poplitée est un facteur non maîtrisable, et d’autre part, si 85 % des récidives sont des exérèses incomplètes [28], il n’y a seulement que 13.3 % [4] d’exérèses incomplètes qui récidivent, ce qui est un chiffre assez voisin du chiffre de 25 % retrouvé dans la littérature comme taux global de récidives post chirurgicales.

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Date 1998
Auteurs Phlébologie, 1998 ; 51:457-463. D. CRETON EC. A.P, rue A PARE, 54100 F-NANCY, Tel : +33(0)3 83 95 54 00, Fax : +33(0)3 83 95 54 23