125 reinterventions pour récidives variqueuses poplitées après exérèse de la petite saphéne

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125 reinterventions pour récidives variqueuses poplitées après exérèse de la petite saphéne

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RESUME

La récidive poplitée après chirurgie de la petite saphène a souvent été attribuée à l’insuffisance d’exérèse de la petite saphène. Afin d’évaluer ce risque d’insuffisance d’exérèse, et étudier le mécanisme de la récidive, nous avons revu 125 réinterventions poplitées pour récidives. Nous avons classé la récidive en cinq catégories : type 1) 17 patients présentaient une petite saphène intacte (13.6 %), type 2) 53 patients présentaient un moignon long avec de nouvelles communications variqueuses superficielles (42.4 %), type 3) 4 patients présentaient un tronc petite saphène résiduel incontinent (3.2 %), 20 patients présentaient à la fois un moignon long et un tronc saphène résiduel incontinent (16 %), type 4) 29 patients présentaient une perforante de la fosse poplitée incontinente (23.2 %), type 5) 2 patients présentaient une récidive avec une nouvelle connexion variqueuse rejoignant les nerfs postérieurs de la cuisse. 75,2 % des cas étaient des insuffisances d’exérèse mais 23,2 % étaient des récidives dues à l’apparition d’une perforante incontinente de la fosse poplitée. La récidive par perforante de la fosse poplitée était significativement plus fréquente chez l’homme que chez la femme. Le délai de réintervention pour récidive poplitée (50 % à 6 ans) après chirurgie de la petite saphène était significativement plus court que le délai de réintervention inguinale pour récidive après chirurgie de la grande saphène (50 % à 12 ans). L’apparition d’une perforante de la fosse poplitée comme type de récidive correspond probablement à l’existence de phénomènes hémodynamiques particuliers au confluent veineux poplité. Ces phénomènes mettent en jeu, probablement, la flexion de la veine poplitée, la contraction des masses musculaires du mollet, mais aussi l’insuffisance valvulaire poplitée qui a été fréquemment mise en évidence chez les patients présentant une insuffisance de la petite saphène.

RESUME

Depuis longtemps la récidive poplitée après chirurgie de la petite saphène a été attribuée à des insuffisances d’exérèse de la petite saphène incontinente. La chirurgie de la petite saphène est encore, aujourd’hui, une pathologie souvent récidivante. Afin d’évaluer ce risque d’insuffisance d’exérèse, et étudier le mécanisme de la récidive, nous avons revu 125 réinterventions poplitées pour récidive après exérèse de la petite saphène incontinente. 48 étaient des cas personnels, et parmi eux, 43 avaient été opérés sans examen ultrasonore préopératoire avant 1991. Les constatations anatomo-chirurgicales nous ont permis de classer la récidive en cinq catégories (Tableau I) :

  • Type 1 : 17 patients présentaient une petite saphène intacte (13,6 %), avec soit une incision inadaptée soit une simple ligature recanalisée.
  • Type 2 : 53 patients présentaient un moignon long (42,4 %) avec de nouvelles communications variqueuses superficielles.
  • Type 3 : 4 patients présentaient un tronc petite saphène résiduel incontinent (3,2 %), 20 patients présentaient à la fois un moignon long et un tronc saphène résiduel incontinent (16 %).
  • Type 4 : 29 patients présentaient une perforante de la fosse poplitée incontinente (23,2 %).
  • Type 5 : 2 patients présentaient une récidive sur une nouvelle connexion variqueuse rejoignant les nerfs postérieurs de la cuisse. Parmi nos récidives personnelles 43 récidives avaient été opérées sans examen écho-Doppler préopératoire ; parmi eux 38 présentaient une insuffisance d’exérèse (Tableau II). Les 5 patients réopérés après examen ultrasonore préopératoire présentaient une récidive sous la forme d’une perforante de la fosse poplitée. La récidive sous la forme d’une perforante de la fosse poplitée était significativement plus fréquente chez l’homme que chez la femme (Tableau III). Le délai de réintervention pour récidive poplitée (50 % à 6 ans) après chirurgie de la petite saphène était significativement plus court que les délais de réintervention inguinale pour récidive après chirurgie de la grande saphène (5O % à 12 ans) (Tableau V). 75,2 % des cas étaient des insuffisances d’exérèse mais 23,2 % étaient des récidives dues à l’apparition d’une perforante incontinente de la fosse poplitée. Ces perforantes de la fosse poplitée pourraient être des moignons résiduels de petites saphènes à trajet complexe, des perforantes méconnues associées à la petite saphène lors de la première intervention, ou une nouvelle incontinence apparaissant sur les nombreuses perforantes décrites au niveau de la fosse poplitée. L’absence de données écho-Doppler préopératoire rend difficile l’interprétation de ces récidives. L’apparition d’une perforante de la fosse poplitée comme type de récidive correspond probablement à l’existence de phénomènes hémodynamiques particuliers au confluent veineux poplité. Ces phénomènes mettent en jeu, probablement, la flexion de la veine poplitée, la contraction des masses musculaires du mollet, mais aussi l’insuffisance valvulaire poplitée qui a été fréquemment mise en évidence chez les patients présentant une insuffisance de la petite saphène.

INTRODUCTION

Malgré la mauvaise réputation de la chirurgie de la petite saphène, on ne dispose pas dans la littérature de données précises concernant les résultats à court et à long terme. Les études de LOFGREN [1] en 1956 montraient déjà que 62 % des récidives étaient dues à des insuffisances d’exérèses. Plus récemment l’exploration écho-Doppler préopératoire nous a permis de mieux préciser les éléments anatomiques résiduels impliqués dans la récidive poplitée [2]. Afin d’évaluer ce risque d’insuffisance d’exérèse et étudier le mécanisme de la récidive, nous avons revu 125 réinterventions poplitées pour récidives après chirurgie de la petite saphène.

MATERIEL ET METHODE

L’étude n’a concerné que les récidives variqueuses poplitées apparaissant après chirurgie de la petite saphène incontinente et dont la source de reflux était située au niveau de la fosse poplitée. Nous avons exclu les récidives variqueuses du mollet ou de la jambe alimentées par des sources variqueuses situées en dehors de la fosse poplitée, c’est à dire issues d’incontinence de la grande saphène, de perforante jambière ou d’une incontinence des veines jumelles par l’intermédiaire de perforantes gémellaires.

L’étude a porté sur 125 réinterventions poplitées pour récidives après exérèse de la petite saphène. Les réinterventions ont été réalisées entre 1990 et 1997. 48 étaient des cas personnels où le bilan préopératoire ainsi que le compte rendu opératoire étaient connus avec précision. 77 cas étaient des cas référés où l’examen écho-Doppler préopératoire ainsi que le compte-rendu opératoire n’étaient pas connus. Tous ces patients ont eu un examen préopératoire écho-Doppler sonde 10 Mhz ESAOTE AU 530 réalisé par l’opérateur juste avant l’intervention. L’examen a été réalisé en position debout en appui sur la jambe opposée par des coupes transversales réalisées sur un mode systématique. Cet examen a permis de mettre en évidence le point d’abouchement de la veine incontinente sur la veine profonde, son type de trajet jusqu’à la surface de la fosse poplitée. La recherche d’une insuffisance veineuse profonde réalisée par un examen écho-Doppler sonde de 7.5 Mhz HITACHI EUB 555 n’a été réalisé que sur 40% des patients.

Parmi nos cas personnels 43 avaient été opérés sans examen ultrasonore préopératoire avant 1991, et 5 avec écho-marquage préopératoire après 1991. La réintervention a été réalisée selon les principes déjà décrits [3] sous anesthésie locale et dans 90 % des cas en ambulatoire. Une incision transversale était toujours faite au-dessus de la précédente. Les constatations anatomiques nous ont permis de classer les récidives en 5 catégories.

  • Type 1 : Petite saphène intacte avec une jonction saphéno-poplitée en place, incontinente, directement en connexion avec un tronc saphène incontinent
  • Type 2 : Ligature de la jonction saphéno-poplitée trop à distance de la veine poplitée, laissant un moignon long responsable de nouvelles communications variqueuses par néovascularisation ou issues des collatérales résiduelles de ce moignon.
  • Type 3 : Insuffisance d’exérèse du tronc saphène incontinent avec nouvelle communication variqueuse entre l’extrémité supérieure de ce tronc incontinent et la veine poplitée (directement ou par l’intermédiaire d’un moignon long résiduel).
  • Type 4 : Veine perforante de la fosse poplitée dans sa situation habituelle avec émergence aponévrotique dans la partie supéro-externe de la fosse poplitée, sans présence de résidu de petite saphène.
  • Type 5 : Varices poplitées connectées par néovascularisation avec les vasanervorum du nerf sciatique ou de ses branches.

Le sexe des patients ainsi que le délai en année entre la première intervention et l’intervention pour récidive ont été notés. Les délais de réintervention en années ont été comparés à ceux d’une précédente étude [4] de 211 réinterventions pour récidives inguinales après exérèse de la grande saphène incontinente. Les comparaisons des distributions indépendantes ont été réalisées par le test de Chi 2 et ont fourni des comparaisons au seuil de risque a de 5 %. Pour chaque comparaison on a donné le degré de significativité p.

RESULTATS

Les résultats sont rassemblés dans le tableau I :

Type anatomique de récidives poplitées

Type Anatomie de la récidive n =125 %
1 Petite saphène 17 13,6 75%
2 Moignon long 53 42,4
3 Tronc saphène Moignon long + Tronc saphène 4
20
3,2
16
4 Veine perforante fosse poplitée 29 23,2
5 Veine sciatique 2 1,6

Les types anatomiques 1.2.3 sont des insuffisances d’exérèse de la petite saphène incontinente (75%), le type 4 correspond à l’apparition d’une perforante de la fosse poplitée et le type 5 à des connections variqueuse avec les vasa-nervorum des nerfs postérieurs de la cuisse.

  • Type 1 : 17 patients présentaient une petite saphène intacte (13.6%). 13 fois l’incision trop haute ou trop latérale pouvait expliquer l’absence d’exérèse. Une fois, l’incision haute chez un patient qui présentait une jonction saphéno-poplitée basse a pu expliquer l’exérèse par erreur de la veine de Giacomini. 3 fois une recanalisation complète du tronc saphène a été constatée sur une ligature au fil non résorbable du tronc saphène au voisinage de la crosse.
  • Type 2 : 53 patients présentaient un moignon long (42.4%). La communication variqueuse avec le réseau variqueux superficiel s’effectuait par l’intermédiaire d’une collatérale souvent tortueuse, présentant une paroi fragile. Le moignon résiduel était souvent reconnaissable à sa texture plus épaisse.
  • Type 3 : (19.2%) 4 patients présentaient un tronc saphène dilaté incontinent sur plus des 2/3 de sa longueur avec à sa partie supérieure, des varices connectées en profondeur, sans origine identifiable (3.2%). 20 patients présentaient un tronc saphène résiduel incontinent dont l’extrémité supérieure était au niveau du pli poplité associé à un moignon résiduel long, incontinent. Une nouvelle communication variqueuse par néovascularisation permettait une recanalisation du reflux sur 1 à 4 cm (16%). Une fois, le moignon long incontinent toujours connecté avec la veine de Giacomini était responsable de varice inguinale par reflux orthograde dans la veine de Giacomini.
  • Type 4 : 29 patients présentaient une veine perforante de la fosse poplitée incontinente. Dans 2 cas cette perforante incontinente de la fosse poplitée était abouchée sur un moignon long résiduel, lui même incontinent. L’incision de réintervention était décalée souvent latéralement (23.2%).
  • Type 5 : 2 patients présentaient une récidive alimentée par une veine rejoignant un nerf postérieur de la cuisse (1.6%). Ces 2 patients avaient été opérés pour une petite saphène incontinente qui se jetait dans le nerf sciatique pour 1 cas et dans le nerf saphène péronier dans l’autre cas. La résection avait été faite au voisinage du nerf.

Tous les abouchements des moignons résiduels de petites saphènes étaient situés au niveau de la fosse poplitée entre 1 et 8 cm sauf un situé 17cm au-dessus du pli poplité. Parmi nos récidives personnelles, 43 récidives étaient des patients opérés sans examen écho-Doppler préopératoire, parmi eux, 38 présentaient une insuffisance d’exérèse. Les 5 patients opérés après examen ultrasonore préopératoire, présentaient une récidive sous la forme d’une perforante incontinente de la fosse poplitée, et aucun patient opéré après examen ultrasonore préopératoire ne présentait d’insuffisance d’exérèse (Tableau II). Parmi l’ensemble des récidives opérées, 76.8 % était des femmes, et parmi les récidives poplitées (type 4) sous forme de perforante de la fosse poplitée 58.6% seulement était des femmes. La comparaison statistique des résultats (p= 0,05) fait apparaître chez l’homme une prédominance significative d’apparition de récidives poplitées sous l’aspect d’une perforante de la fosse poplitée (Tableau III). La courbe en pourcentages cumulés des patients en fonction du délai de réintervention a montré (Tableau IV) que 25 % des patients avaient été réopérés avant 3 ans, 50 % l’étaient avant 6 ans, et 70 % l’étaient avant 9 ans. L’étude des courbes séparées a montré que dans les 8 premières années la récidive par perforante de la fosse poplitée apparaissait 1 an avant les récidives par insuffisance d’exérèse (différence non significative).

Tableau II

Type anatomique de récidives en fonction des examens écho-Doppler préopératoires (48 cas personnels)

Sans écho-Doppler Avec écho-Doppler
Insuffisance d’exérèse 38 0
Veine fosse poplitée 5 5

Tableau III

Répartition des récidives poplitées selon le sexe (n =125)

Homme Femme
Récidive poplitée 32,2% 76,8%
Récidive poplitée par perforante de la fosse poplitée 41,4% 58,6%

Le risque d’apparition d’une perforante de la fosse poplitée comme type de récidive après exérèse de la petite saphène incontinente est significativement plus fréquent chez l’homme que chez la femme (p < 0.05).

Tableau IV

Par contre, la comparaison des courbes en pourcentages cumulés des patients en fonction du délai de réinterventions concernant les récidives petites saphènes et les récidives grandes saphènes [4] (Tableau V) a montré que la récidive poplitée était significativement plus précoce que la récidive inguinale. La moitié des patients opérés d’une incontinence grande saphène était réopérée 12 ans après. La moitié des patients opérés d’une incontinence petite saphène l’était 6 ans après. 12 ans après l’intervention 50 % des incontinences grandes saphènes étaient réopérées, alors que 80 % des incontinences petites saphènes étaient déjà réopérées (différence significative p< 0,05).

Tableau V

DISCUSSION

La réintervention poplitée concerne les récidives où la source du reflux est située dans la fosse poplitée, avec un trajet variqueux traversant la fosse poplitée. Cette étude anatomique des réinterventions montre que 75.2 % des cas sont des exérèses insuffisantes de la petite saphène soit vers le haut, (jonction saphéno poplitée ) ou vers le bas (tronc saphène ), 1.6 % sont des récidives prévisibles représentant les incontinences issues des veines des différents nerfs postérieurs de la cuisse, et 23.2 % sont des récidives imprévisibles où les phénomènes de pression veineuse poplitée jouent certainement un rôle important. La différence significative existant entre le délai d’apparition de la récidive poplitée et de la récidive inguinale est en faveur d’une origine locale au développement d’une incontinence sur les collatérales de la veine poplitée. Ceci confirme l’idée que, cliniquement, la récidive poplitée est d’apparition plus rapide et plus précoce que la récidive inguinale (Tableau V). De nombreuses séries de la littérature donnent l’insuffisance d’exérèse petite saphène comme cause principale de la récidive, 62% pour TONG [5], (tableau VI). Mais les causes de la récidive ne sont pas toujours des insuffisances d’exérèses.

Tableau VI :

Répartition des types anatomiques de récidives poplitées après exérèse de la petite saphène (n = 328)

Insuffisance d’éxérèse
n = 328 PS ML ML + TS TS Total n Total % VFP n VFP % VJ Divers
De MASSENER [11] 12 11 11 91,6 1
TONG [5] 70 20 11 8 4 43 61,4 1 14 24 2
PERRIN [19] 61 13 37 6 56 91,8 2 3,2 3
RETTORI [16] 59 25 25 42,3 17 28,8 17
CRETON 125 17 53 20 4 94 75,2 29 23,2 2

Analyse comparative de séries concernant l’insuffisance d’exérèse et la perforante de la fosse poplitée. PS = petite saphène, ML = moignon long résiduel, TS = tronc saphène résiduel, VFP = veine perforante de la fosse poplitée, VJ = veine jumelle.

LES CAUSES ANATOMIQUES EXPLIQUANT LE RISQUE D’INSUFFISANCE D’EXERESE

Les variations anatomiques importantes de la jonction saphéno-poplitée dépendent de l’embryologie de la petite saphène. Ce sont les bourgeons nerveux qui induisent le développement des veines superficielles et profondes. La jonction saphéno-poplitée dériverait d’une anastomose entre le plexus veineux postaxial (veine marginale externe) et le plexus veineux axial [6]. L’absence d’anastomose nerveuse entre les deux plexus expliquerait l’inconstance de la jonction saphéno-poplitée [7,8].

La petite saphène peut donc, après le pli poplité, monter verticalement derrière la cuisse, sur le trajet du nerf cutané postérieur de la cuisse (postaxial). Cette veine sous aponévrotique postérieure nommée aussi veine de Hyrthl, de Stolic ou de Giacomini peut se jeter dans la veine grande saphène. La petite saphène peut se jeter dans la veine poplitée, au niveau de la région poplitée, par une crosse qui résulte de l’ancienne anastomose axio-postaxiale. La crosse s’abouche chez le sujet sain, avec une égale fréquence, à angle droit ou à angle aigu [9]. La petite saphène peut aussi se jeter dans la veine fémorale par une branche haute, oblique, qui correspond à la persistance d’une anastomose de type axial. Enfin, la petite saphène peut se jeter en dessous du pli poplité dans les veines musculaires ou dans la grande saphène. L’embryologie explique certaines dispositions anatomiques particulières (piège chirurgical).

  • a/ Les collatérales veineuses de la jonction saphéno-poplitée sont souvent situées sur les trajets des anciens plexus postaxiaux et particulièrement vers le haut au niveau de la convexité de la crosse. Ces collatérales issues de la condensation antérieure ou postérieure du plexus axial primitif (veine postérieure du nerf tibial) peuvent être confondues avec la veine poplitée lors d’une dissection insuffisante. La veine du sciatique ou la veine fémorale postérieure peuvent aussi s’aboucher dans la petite saphène au lieu de s’aboucher dans la veine poplitée. Ces veines souvent volumineuses peuvent aussi être confondues avec la veine poplitée.
  • b/ Il existe parfois des abouchements directs de la petite saphène dans le nerf sciatique, dans le nerf fibulaire ou le nerf tibial avec une jonction indissociable entre le nerf et la veine. Ces types d’abouchements peuvent être à l’origine de grave difficultés opératoires et de récidives. Ces abouchements véno-nerveux représentent environ 3.5/1000 explorations poplitées pour varices poplitées [10].

1/ L’insuffisance d’exérèse de la jonction saphéno-poplitée (moignon long).

Elle est la cause la plus fréquente des récidives. De-MAESSENER [11] sur 12 patients réopérés a mis en évidence 11 jonctions résiduelles avec un abouchement situé entre 5 et 10 cm au-dessus du pli poplité. De façon indirecte, certains auteurs FEUERSTEIN [12], FISCHER [13,14], et MILDNER [15] ont étudié le suivi du moignon long résiduel. Dans le cadre de l’étude des résultats à long terme des ligatures sous fasciales de la petite saphène incontinente (ligatures faites à distance de l’abouchement de la veine poplité), ces auteurs ont rapporté entre 13.5% [15] et 31 % [12,13,14] de récidives poplitées. L’apparition de ces récidives peut s’expliquer par la fréquence très importante de collatérales de la jonction saphéno poplitée. Ces collatérales ont été constatées dans 92,5 % des cas sur des études anatomiques chirurgicales de la petite saphène incontinente [6]. Les collatérales de la convexité de la crosse existent dans 35% des cas pour RETTORI [16].

La similitude de la crosse de la perforante de la fosse poplitée et de la petite saphène [7] pourrait expliquer certaines confusions lorsque l’exérèse chirurgicale a été réalisée sans examen écho-Doppler préopératoire.

2/ L’insuffisance d’exérèse tronculaire.

Elle s’accompagne de phénomènes de néo-vascularisation qui mettent en connexion la veine fémorale ou le moignon long et le tronc petite saphène résiduel (récidive de type 3). Dans 18% des cas le tronc de la petite saphène serait dédoublé au tiers supérieur de mollet [17] et dans 6 % des cas la petite saphène serait double avec une jonction unique au voisinage de la crosse [18]. Ces dédoublements tronculaires pourraient expliquer certaines insuffisances d’exérèse tronculaire.

3/ La veine perforante de la fosse poplitée.

La récidive variqueuse poplitée représentée par l’apparition d’une veine perforante de la fosse poplitée semble avoir une étiologie propre. En effet, rien ne permet d’expliquer que ce type de récidive poplitée soit significativement plus fréquent chez l’homme que chez la femme (phénomènes particuliers d’hyperpression veineuse ou musculaire ?). Une exérèse complète de la petite saphène n’empêche pas le risque d’apparition de ce type de récidive. En effet, toutes nos récidives ayant eu une exérèse complète de la petite saphène après un repérage préopératoire écho-Doppler étaient des perforantes de la fosse poplitée d’apparition récente non constatées lors de la première intervention (tableau II). La fréquence de récidives apparaissant sous la forme de veines fosse poplitées est importante dans certaine série (23 % dans notre expérience et 10% dans la série de MILDNER [15]). Elle est plus rare dans d’autres séries (TONG [5] 1.4 %, PERRIN [19] 3.2% ). Cette différence pourrait avoir plusieurs explications. Il existe tout d’abord une similitude anatomique normale constatée dans 29 % des cas environ, entre la jonction saphéno poplitée incontinente de forme complexe et la veine fosse poplitée [20]. De ce fait, certaines veines fosses poplitées, réopérées dans notre série de cas général, pourraient être des moignons longs, résiduels de veines petite saphène à jonctions complexes. D’autre part, pour DODD [21], les perforantes de la fosse poplitée rejoignent la petite saphène avant son abouchement dans 50 % des cas. De ce fait, dans ce type d’abouchement, il est anatomiquement difficile de faire la différence entre une récidive par moignon long et par une perforante de la fosse poplitée. D’autre part, RETTORI [16] a mis en évidence 9.8 % d’associations d’une incontinence petite saphène et d’une veine fosse poplitée. La récidive pourrait être une veine fosse poplitée méconnue lors de la première intervention d’exérèse petite saphène. Le nombre et la variété de perforantes de la fosse poplitée [21,22] en expliquent certainement la fréquence. Ce sont autant de sources potentielles de récidives lorsqu’elles deviennent incontinentes.

LES CAUSES HEMODYNAMIQUES DE LA RECIDIVE

Les causes hémodynamiques favorisant l’apparition d’une récidive sont probablement les même que celles qui induisent l’incontinence de la petite saphène. Cette prédisposition pourrait trouver une explication dans la physiologie particulière du complexe veineux poplité ou dans la présence d’une insuffisance valvulaire veineuse poplitée fréquemment associée.

  • La physiologie du confluent veineux poplité est encore mal connue. Le confluent veineux poplité est un système jonctionnel entre les nombreuses veines musculaires collectrices de la jambe et le tronc collecteur de la cuisse. La veine poplitée est un tronc veineux profond situé dans une zone tissulaire de faible pression. Elle n’est pas entourée de masses musculaires comme au niveau du mollet ou des muscles postérieurs de la cuisse. De plus, cette portion est soumise aux mouvements très importants de flexion-extension de la jambe et aux à-coups de pression dans la veine poplitée lors de la contraction des jumeaux. Lorsque le genou est en hyperextension, la compression de la veine poplitée contre le condyle interne et la tension de l’anneau du troisième adducteur peuvent provoquer un reflux ostial de la jonction saphéno-poplitée [23]. Si la valve pré-ostiale est continente, ainsi que le tronc de la petite saphène, le reflux peut se propager sur les collatérales situées entre la valve ostiale incontinente et la valve préostiale continente. Le reflux orthograde, constaté fréquemment dans une veine de Giacomini dilatée [24,25], est souvent le témoin de cette hypertension. La jonction saphéno-poplitée est située juste en aval de la valve poplitée inférieure, valve la plus efficace [26]. De ce fait, la valve ostiale est particulièrement vulnérable aux à-coups veineux hypertensifs, dynamiques intrapoplités. La dilatation particulière des veines jumelles [27] s’expliquerait par ce phénomène d’amortisseur des phénomènes d’hypertension endopoplitée rencontrés lors de certains mouvements. La contraction des jumeaux s’accompagne d’une augmentation de pression intramusculaire pouvant atteindre 200 à 300 mm/Hg [28]. Cette contraction produit une accélération circulatoire transmise directement dans la veine poplitée. Paradoxalement, les variations positionnelles actives du membre inférieur ne s’accompagnent pas d’une augmentation importante ou brutale de pression dans la veine poplitée [29]. Seule la flexion dorsale du pied, la flexion de la cuisse sur le thorax en décubitus ainsi que la position « pied avant » pendant la marche s’accompagnent d’une élévation significative de la pression veineuse poplitée. Aucune étude n’a vérifié le rôle des à-coups de pression intéressant le complexe veineux poplité situé en charnière entre les deux groupes musculaires du mollet et de la cuisse.
  • L’insuffisance valvulaire poplitée est un facteur qui peut être aussi évoqué. L’incontinence d’une valve poplitée, en aval de la jonction saphéno-poplitée, entre l’anneau du solaire et le canal de Hunter [28] provoquerait pendant la diastole musculaire, du fait de la brutale décompression musculaire dans un espace veineux fermé, un forçage par reflux sur la valve ostiale petite saphène. Après résection complète de la petite saphène incontinente, l’apparition d’une nouvelle incontinence intéressant une perforante de la fosse poplitée pourrait s’expliquer par la persistance du même trouble hémodynamique profond. BRUNNER [30,31] a mis en évidence 68.7% de reflux poplité chez les patients présentant une insuffisance de la petite saphène. ALMGREN [32] a mis en évidence 21 % d’insuffisance veineuse profonde chez les patients variqueux et 42.9 % chez les patients présentant des récidives variqueuses. Ainsi l’insuffisance veineuse profonde associée joue certainement un rôle important dans l’incontinence petite saphène et dans la récidive [33-39]. SOMJEN [40] par contre, a montré que le reflux dans la veine poplitée pouvait être induit par l’insuffisance de la petite saphène. Ce reflux, constaté chez le patient présentant un reflux petit saphène, pouvait disparaître après suppression de la petite saphène.

L’exérèse incomplète de la petite saphène est certainement un facteur important de récidive. Mais, si dans cette étude 75% des récidives étaient des exérèses incomplètes d’autres séries [12-15] ont montré par contre que l’exérèse incomplète de la petite saphène ne donnait que 13% de récidive. La meilleure compréhension de l’hémodynamique du confluent veineux poplité devrait permettre une meilleure évaluation du risque de récidive.

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Date 1999
Auteurs J Mal Vasc 1999 ; 24 :30-6. D. CRETON EC. A.P, rue A PARE, 54100 F-NANCY, Tel : +33(0)3 83 95 54 00, Fax : +33(0)3 83 95 5423