Chirurgie hyperselective

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Chirurgie hyperselective

Comment choisir la meilleure technique d’oblitération endovasculaire : Closure ® , Laser, ou la sclérose à la mousse sur cathéter long ?

Creton D, Milleret R, Uhl JF
Creton D, E.C. Ambroise PARE. Rue Ambroise PARE. 54100 F-NANCY

Trois techniques d’oblitération des troncs saphènes par voies endovasculaires sont actuellement disponibles en remplacement de l’instrument appelé « stripper ». La première utilise l’énergie thermique du laser ou LEV, la seconde celle des ondes radiofréquence Closure® et la troisième utilise la sclérothérapie à la mousse injectée par long cathéter. Ces 3 techniques proches mais différentes présentent en fait des indications anatomiques spécifiques. Le risque de lésions neurologiques au niveau de la saphène jambière et de la petite saphène interdit l’utilisation de Closure® à cet endroit. Closure® est la technique qui est la plus précise sur le tronc mais qui nécessite à la différence du LEV une exsanguination parfaite. Enfin, à la différence de Closure®, le diamètre du tronc à traiter n’est pas limité dans le LEV et la scléromousse sur cathéter. Une bonne connaissance de ces 3 techniques est nécessaire pour choisir la meilleure indication.

La Radio Fréquence

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Le laser Endoveineux

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La Sclero Mousse

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Introduction

De la même façon que la CHIVA n’est pas une technique opératoire mais une méthode thérapeutique, Closure® et le laser endoveineux (LEV) ne sont pas des principes techniques (on entend souvent parler de centre Laser !) mais de simples outils au même titre que le stripper de Codmann®, le Vastrip® ou le pin-stripper qui permettent simplement de supprimer une portion veineuse rectiligne d’un point A à un point B.

Trois techniques d’oblitération des troncs saphènes par voies endovasculaires sont actuellement disponibles comme alternatives à l’exérèse chirurgicale par stripping [1]. La première publiée utilise la fibre laser ou LEV [2], la seconde qui a fait l’objet aujourd’hui de nombreuse étude de résultats à plus de 2 ans, comparatives ou randomisées utilise le sonde Closure® (oblitération thermique par radiofréquence) [3] et la troisième utilise la sclérothérapie à la mousse injectée dans les troncs à l’aide d’un cathéter long. Cette technique, à la différence de la sclérothérapie à la mousse par ponction directe ou par cathéter court n’a fait l’objet que de peu d’étude [4]. Bien que ces 3 techniques soient proches elles ne sont pas identiques et il nous a semblé intéressant de leur chercher à chacune une place spécifique pour des indications très spécifiques.

Ces 3 techniques sont différentes en terme de complexité de protocole, de fiabilité d’efficacité, de matériel, de coût, et il est difficile d’en parler, de les comparer sans les connaître et les pratiquer toutes. Chacune présente ses avantages, ses inconvénients, ses limites et si on fait abstraction du coût il devrait être possible de définir des indications précises pour chacune de ces 3 techniques. L’avantage d’une technique doit associer la meilleure efficacité et le moindre traumatisme. La comparaison doit se faire avec le stripping par invagination sous anesthésie locale qui est chirurgicalement la façon la moins agressive de supprimer un tronc saphène mais, quand même plus lourde et plus agressive que les techniques endovasculaires.

Bien qu’aucune étude n’ait montré qu’un traitement définitif en un temps était plus efficace qu’un traitement en plusieurs temps cela paraît pourtant logique intuitivement. En effet le confort du patient est meilleur et le problème hémodynamique motivant l’intervention est traité en une fois complètement sans que s’organisent entre temps d’autres disfonctionnements pouvant compliquer la compréhension du problème. Il existe, par contre, une autre méthode thérapeutique, la CHIVA, qui privilégie au contraire le traitement en 2 temps entre lesquels la nouvelle organisation des shunts veino-veineux nécessite parfois un second geste [5]. A la différence de cette méthode de traitement purement hémodynamique il paraît logique de privilégier l’exérèse en un temps dans les méthodes de traitement par exérèse.

Il est difficile de parler d’une technique sans être influencé par ses habitudes et sa propre expérience. Il est aussi difficile de pratiquer régulièrement des techniques différentes et d’en avoir la même expérience surtout quand ces techniques sont voisines. Le but de cette réflexion est d’être objectif.

Comparaison des 3 techniques d’oblitération endovasculaire

  1. Délai du résultat Après le stripping dont la suppression du tronc saphène est immédiate vient la technique Closure ® puis le LEV et la sclérose sur cathéter dont l’efficacité est définitive parfois seulement après une sclérose complémentaire à l’aiguille. Il semble que la vitesse d’oblitération obtenue par ces 3 techniques soit très voisine voire plus rapide avec la sclérose sur cathéter [4]. Le choix d’une technique doit prendre en considération la possibilité d’utiliser une technique de remplacement en cas d’insuffisance d’efficacité ou d’échec. La sclérose doit être possible facilement pour compléter un traitement insuffisant.
  2. L’efficacité. Si on compare l’efficacité finale et radicale de ces 3 techniques il semble qu’après le stripping qui enlève immédiatement et définitivement le tronc vienne la technique Closure ® qui en une séance fait disparaître le tronc dans plus de 90% des cas puis le LEV et enfin la sclérose sur cathéter ; ces 2 techniques nécessitant parfois une sclérose écho-guidée complémentaire pour obtenir une fermeture définitive du tronc.
  3. L’agressivité. En comparant l’agressivité de ces 3 techniques, après le stripping vient probablement le LEV qui induit plus d’hématomes et de réactions inflammatoires que Closure® et ensuite la sclérose sur cathéter qui ne laisse en principe aucune trace cutanée si la procédure concerne un tronc sous fascial. Seule une légère réaction inflammatoire retardée peut se voir à la troisième semaine correspondant à la transformation fibreuse du matériel endoveineux. La reprise d’activité normale du patient est d’autant plus rapide que cette agression est moindre. Seule Closure a fait l’objet d’une étude randomisée qui a montré la supériorité de Closure® par rapport à l’invagination en terme de qualité de vie de morbidité et de douleur post-opératoire [6].
  4. La complexité. En comparant la complexité de ces 3 techniques il est clair qu’après le stripping, Closure® est la plus lourde, vient ensuite le LEV qui et plus rapide et plus simple puis la sclérose sur cathéter qui est incontestablement la plus simple à condition de respecter le protocole rigoureux d’exsanguination nécessaire pour l’obtention de résultats optimaux.
  5. Le coût. En comparant le coût de l’intervention en France pour le patient, la plus économique est le sclérose sur cathéter, puis le stripping sous anesthésie loco-régionale en ambulatoire, puis le LEV, et enfin Closure®. La durée de l’arrêt de travail post-opératoire est significativement plus longue dans le stripping que pour Closure® [6]. En Finlande en tenant compte de l’arrêt de travail Closure® revient moins cher que le stripping traditionnel [7].
  6. L’anesthésie. En comparant les méthodes anesthésiques associées, la tumescence est employée pour le LEV et Closure®, le bloc fémoral pour le stripping et une simple anesthésie locale pour le cathéter.

Les indications particulières ou spécifiques

La suppression des troncs concerne les troncs de la grande veine saphène fémoral ou jambier, sus ou sous fascial, accessoire ou antérieur, le tronc de la veine petite saphène proximale ou distale ou les troncs communicants du type de la veine de Giacomini. Ces troncs peuvent, d’ailleurs avoir déjà été opéré s précédemment. Les diamètres, les variations de calibres, les types anatomiques et hémodynamiques des perforantes connectées, l’état de la peau en regard du tronc concerné, le nombre de phlébectomies de voisinage, les possibilités de rattrapage en fonction des échecs possibles de la technique sont des éléments qui doivent peser dans le choix de la meilleure technique. Même si la sclérothérapie écho-guidée à la mousse permet aujourd’hui de rattraper à peu de frais la plupart des échecs il n’est pas intellectuellement logique de compter avec cet argument pour décider de la technique choisie. Après une perforation due à une fausse route du pin stripper il et encore possible d’utiliser Closure® ou le LEV si le tronc s’y prête et si le passage de la sonde est possible à l’aide d’un guide-wire mais la sclérose sur cathéter du fait du risque d’extravasation n’est pas possible.

La grande veine saphène
Considérant la suppression du tronc de la grande saphène entre la jonction saphéno-fémorale et la partie haute jambière avec un diamètre maximum de 10/12 millimètre la technique Closure ® est idéale car elle permet de débuter la procédure au millimètre prés en dessous de la valve ostiale. L’induction thermique est en effet parfaitement circulaire et très précise sur la paroi veineuse, le positionnement des broches en position ouverte est facile à contrôler sous échographie. La précision du « start point » de la procédure est aussi intéressant pour la suppression d’un tronc incontinent situé en dessous de la jonction d’une veine de Giacomini transmettant un reflux systolique de la jonction saphéno-poplité vers la jonction saphéno-fémorale par l’intermédiaire de la portion de grande saphène proximale continente. La situation tronculaire susfasciale ne présente plus de risque de brûlure avec la tumescence. L ‘introduction de la sonde Closure ® peut se faire par ponction sous échographie s’il n’y a pas de phlébectomie à faire à l’emplacement de l’introduction. Dans le cas contraire une phlébectomie supplémentaire n’est pas un inconvénient. La technique Closure ® au niveau de la cuisse est certainement la meilleure du fait de la précision du « start point » et de l’absence d’hématome et de réaction inflammatoire.

Tortuosité et gros diamètre
La possibilité d’utiliser un guide-wire avec la fibre laser et la sonde Closure ® rend identique les difficultés éventuelles de franchissement de tortuosités. Mais une trop grande différence de diamètre le long du tronc (qui pourrait nécessiter 2 types de sonde Closure®) ou un anévrisme (qui rend inopérante la sonde Closure ®) permet d’utiliser plus facilement la fibre laser.

La saphène jambière et la petite saphène
Du fait de la pénétration thermique en profondeur de la paroi veineuse dans la technique Closure ® (1.5mm) celle ci n’est pas utilisable sans risque au niveau de la jambe lorsque le nerf saphène quitte la région sous aponévrotique pour longer la veine grande saphène. Par contre la fibre laser est utilisable car la brûlure laser du fait de l’ébullition du sang (840 nm) [8] touche l’endothélium sans beaucoup d’effet trans-pariétal. La même situation anatomique se retrouve sur la veine petite saphène ou le nerf sural médial et caudal sont au contact de la veine sur les 2/3 inférieurs de la jambe. A cet endroit la fibre laser est une bonne indication. De la même façon la suppression d’un tronc de veine petite saphène remontant très haut dans la fosse poplitée est plus facile à traiter par laser car le risque neurologique est moindre et l’exsanguination nécessaire à la sonde Closure ® est anatomiquement impossible. La nécessité de devoir positionner précisément le début de la procédure sur la petite veine saphène par rapport aux veines jumelles devrait pourtant donner l’avantage à Closure® ; ceci d’autant que les relations entre la petite veine saphène et les veines jumelles sont en générale basses donc plus loin des croisements nerveux.

Les veines périnéales
Concernant l’insuffisance tronculaire saphène alimentée par des veines périnéales, l’idéal est d’introduire un cathéter de bas en haut et d’injecter de la mousse à l’extrémité supérieure du cathéter avant la procédure afin de scléroser au maximum les veines périnéales de bas en haut.

Les perforantes
La même situation anatomique se retrouve dans les insuffisances tronculaires alimentées par des perforantes de cuisse longue, fine, bifide, serpigineuse chirurgicalement non accessible, l’injection de mousse à l’extrémité supérieure du tronc permet de traiter la perforante dans le même temps. Par contre si la perforante de cuisse est volumineuse à gros débit, du fait des difficultés d’exsanguination le LEV présente certainement plus d’intérêt.

Les récidives
L’exérèse des troncs saphènes de cuisse résiduels incontinents est un problème chirurgical difficile qui peut s’avérer quelque fois impossible du fait du risque traumatique opératoire. Pour ces cas anatomiques l’oblitération endovasculaire et une bénédiction. L’introduction d’un cathéter de bas en haut bloqué à l’extrémité supérieur du tronc résiduel permet d’injecter la mousse de sclérosant jusque dans les veines incontinentes lymphoganglionnaires ou dans les petites varices qui mettent en communication le système veineux profond fémoral et le tronc résiduel. La principale difficulté est d’accéder au tronc pour introduire la sonde. La ponction percutanée et parfois la seule solution.

L’obésité
La suppression d’un tronc volumineux profond chez un patient obèse relève plus d’une indication de LEV que de Closure® car l’exsanguination du fait de l’obésité est moins facile à réaliser. D’autre part, les hématomes du LEV éventuellement induits par l’extravasation sanguine ont moins de conséquence cutanée du fait de la profondeur.

Les troncs sus-fasciaux
Contrairement à ce qui avait été dits au début de l’expérimentation de Closure® pour les troncs sus-fasciaux, la tumescence permet d’éviter le risque de brûlure cutanée. De ce fait, il semble que ces dispositions anatomiques soient une bonne indication de Closure® car le traitement laser ou la sclérothérapie sur cathéter donne assez souvent des pigmentations cutanées postopératoires.

Les anticoagulants
Le choix d’une technique laissant le moins d’hématome comme Closure® pourrait s’avérer plus intéressant chez les patients sous anticoagulants ou chez les patients désirant être opéré l’été.

La précision
Lorsqu ‘il est nécessaire d’avoir un point de départ et d’arrivée très précis sur le tronc à supprimer (origine sur une collatérale incontinente, arrêt sous une perforante de réentrée) Closure® est certainement la plus précise. Si la suppression doit s’étendre au-delà (origine sur une perforante incontinente) le LEV ou la sclérose à la mousse sont idéal. La compression du tronc peut même orienter la progression de la mousse au-delà de l’extrémité du cathéter vers une perforante ou une collatérale.

Le lymphoedème
L’obligation d’atraumatisme total de l’environnement du tronc à traiter fait de la sclérose sur cathéter la meilleure indication. Le LEV dont les éventuelles perforations risquent d’endommager les lymphatiques semble moins indiqué que Closure®.

Les troubles trophiques
Les difficultés de réalisation de l’exsanguination dans des régions riches en connections veineuses, en perforantes et en collatérales variqueuses peuvent rendre plus efficace l’utilisation de la fibre laser comme au niveau de trouble trophique de la jambe [9]. Malgré la difficulté d’exsanguination du fait de la rigidité des tissus la sclérose sur cathéter peut être intéressante pour la sclérose simultanée des perforantes incontinentes.

Conclusion

Les grands principes d’indications sont rassemblés dans le tableau I. Le risque de lésions neurologiques au niveau de la saphène jambière et de la petite saphène interdit l’utilisation de Closure® à cet endroit. Closure® est la technique qui est la plus précise sur le tronc mais qui nécessite à la différence du LEV une exsanguination parfaite. Enfin, à la différence de Closure®, le diamètre du tronc à traiter n’est pas limité dans le LEV et la scléromousse sur cathéter. Il est bien évident que si on tient compte du matériel, du coût, du temps passé, de la formation de l’opérateur d’autres solutions pourtant moins logiques d’un point de vue de la théorie peuvent tout à fait se justifier et donner de bons résultats ou du moins donner satisfaction au patient. Ces techniques font partie de notre arsenal thérapeutique, doivent donc être apprises et pratiquées par les équipes spécialisées. Ces techniques sont amenées inévitablement à se développer. On sait que les récidives après éveinages sont précoces (dans les 2 ans), hors ces 3 techniques ont dépassé ce recul avec un excellent maintien du taux d’oblitération. Chaque équipe spécialisée devrait connaître une des deux méthodes thermiques et la sclérose par long cathéter.

Références

  1. Perrin M. Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs. Encycl Méd Chir, Techniques Chirurgicale- Chirurgie Vasculaire, Elsevier, Paris, 43-161-C, 2003, 11p.
  2. Chang CJ, Chua JJ. Endovenous laser photocoagulation (EVLP) for varicose veins. Lasers Surg Med 2002;31:257-62
  3. Manfrini S, Gasbarro V, Danielsson G, Norgren L, Chandler JG, Lennox AF, Zarka ZA, Nicolaides AN. endovenous management of saphenous-vein reflux. J Vasc Surg 2000;32:330-42
  4. Milleret R. Allaert FA, Garandeau C. Scléromousse par long cathéter : Alpha technique. Phlébologie 2003 ;4 (à paraître)
  5. Cappelli M, Lova RM, Ermini S, Turchi A, Bono G, Bahnini A, Franceschi C. La cure CHIVA dans le traitement de la maladie variqueuse: analyse critique des résultats à trois ans. Ann Chir Vasc 2000; 14: 376-84.
  6. Lurie F, Creton D, Eklof B, Kabnik L, Kistner RL, Pichot O, Sessa C, Shuller-Petrovic S. Prospective randomized study of endovenous radiofrequency obliteration (closure) versus ligation and stripping in selected patient population. J Vasc Surg 2003;38:207-14.
  7. Rautio TM, Ohinmaa A, Perala J, Ohtonen P, Heikkinen T, Wiik H et al. Endovenous obliteration versus conventional stripping operation in the treatment of primary varicose veins: a randomized controlled trial with comparison of costs. J Vasc Surg 2002;35:958-65
  8. Proebstle TM, Lehr HA, Kargl A, Espinola-Klein C, Rother W, Bethge S, Knop J. Endovenous treatment of the greater saphenous vein with a 940-nm diode laser: thrombotic occlusion after endoluminal thermal damage by laser-generated steam bubbles J Vasc Surg 2002;35:729-36
  9. Gérard JL, Desgranges P, Becquemin JP, Desse G, Mellière D. Peut on traiter les grandes saphènes variqueuses par laser endoveineux ambulatoire ? Résultats à un mois d’une étude de faisabilité sur 20 patients en salle de consultation. J Mal Vasc 2002 ;27 :222-5
Tableau I Closure® LEV Sclérose sur cathéter
Risque neurologique GVS jambe et PVS ++ + 0
Précision d’occlusion ++ + 0
Exsanguination ++ 0 +
Diamètre du tronc 2 – 12 mm Sans limite ?

Comparaison des éléments anatomiques permettant d’orienter l’indication thérapeutique.
GVS : grande veine saphène
PVS : petite veine saphène

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