Hypothèses étiologiques des récidives variqueuses saphène interne : étude anatomique sur 211 cas

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Hypothèses étiologiques des récidives variqueuses saphène interne : étude anatomique sur 211 cas

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INTRODUCTION

Le traitement chirurgical du reflux saphène interne s’accompagne d’un pourcentage important de récidives évalué é 20 % 25 % avec des extrèmes allant de 7 % [1] à 65 %[2]. Leur traitement chirurgical représente environ 20 % [3] des interventions de varices . L’étude écho doppler préopératoire et l’étude anatomique péropératoire de nos réinterventions inguinales pour récidives saphène interne nous a permis d’émettre une hypothése hémodynamique de la récidive saphène interne.

MATERIEL ET METHODE

Entre 1992 et 1994 sur 2149 exérèses variqueuses réalisées sur 1889 patients, nous avons opéré 419 récidives variqueuses, ( 19,4 % de notre activité). Parmi celles-ci, nous avons uniquement étudié les récidives en territoire saphène interne comportant une reprise de l’ancienne crossectomie pour reflux inguinal : soit 211 cas.

Reflux haut résiduel

Nous avons étudié le type anatomique d’alimentation du reflux haut résiduel et son importance hémodynamique.

1°) jonction fémoro variqueuse importante , notée C+.

Parmi les reflux résiduels issus d’un ancien moignon de crossectomie nous avons appelé par ordre décroissant en fonction de la taille de la jonction et de l’importance du reflux

  • C+ 1 les crosses saphène s internes intactes
  • C+ 2 les jonctions par une branche unique résiduelle de l’ancienne crossectomie .
  • C+ 3 les jonctions par une branche bifurquée résiduelle de l’ancienne crossectomie .
  • C+ 4 les jonctions par une branche trifurquée résiduelle
  • C+ 5 les jonctions par une branche quadrifurquée résiduelle.
  • C+ 6 les reperméabilisations de la crosse sur mauvaise ligature de la crosse.
  • C+ 9 les reflux par des perforantes de cuisse situés à moins de 15 cm du moignon.
  • C+ 10 les reflux par une volumineuse branche juxta inguinale ( double crosse).
2°) jonction fémoro variqueuse mineure, néoangiogénése sur le moignon fémoral noté :
  • C0 7 pour l’angiogénèse inguinale sur le moignon fémoral.
  • C0 8 pour le reflux alimenté par les veines honteuses externes
  • C0 11 pour le reflux alimenté par des veines sous cutanées abdominales,

Varice résiduelle à la cuisse

Nous avons étudié le type de varice résiduelle à la cuisse

1°) saphène résiduelle refluante d’un diamétre supérieur à 3 mm et d’une longueur supérieure à 15 cm (S+). Nous avons noté
  • S+ 1 quand elle se raccorde directement avec la source de reflux sur la veine fémorale.
  • S+ 2 quand il existe une néojonction saphéno fémorale de 2 à 10 cm.
  • S+ 3 quand elle est isolée plus basse sans communication visible avec la voie profonde,
  • S+ 4 quand elle est alimentée par une veine honteuse externe ,
  • S+ 5 quand elle est alimentée par une perforante de cuisse.
2°) varice diffuse non systématisée notée S0.

L’importance de la récidive, appréciée globalement sur sa tolérance clinique est jugée par le délai en année , entre la premiére intervention et la réintervention . Afin de comprendre le rôle pathologique des différents critéres anatomiques de la récidive et leur importance hémodynamique, nous avons étudié les corrélations entre ces différents facteurs.

RESULTAT

L’origine du reflux

  • L’exploration de l’ancienne crossectomie a permis de retrouver 137 reflux importants : 35 crosses intactes ( C+ 1) dont 19 en continuité avec la saphène interne. 52 % sont des reflux sur crosse intacte ou sur volumineuse branche unique résiduelle, les autres sont des reflux retrouvés sur la branche basse de bifurcation du tronc résiduel.Un peu moins de la moitié de ces reflux communiquent avec une saphène résiduelle.
  • 15 perforantes hautes de cuisse (C+ 9) (C+ 10) sont responsables du reflux dont une volumineuse (C+10) située à 5 cm en-dessous du moignon de crossectomie, correspond à l’abouchement d’une deuxiéme saphène méconnue lors de la premiére intervention.
  • 47 fois un reflux mineur est constaté : néoangiogénèse ou néojonction fémoro variqueuse microscopique ( C0 7). Aucun moignon de ce type n’est en communication avec la saphène résiduelle.
  • 12 fois un reflux mineur est issu de varices génito crurales ( C0 8)
  • 1 reflux mineur (C0 11) vient de branches sous cutanées abdominales.

Le type de saphène résiduelle

Tableau I

  • Corrélation entre le type de reflux inguinal C et le type de saphène résiduelle S
  • Dans 93 cas nous avons retrouvé des varices diffuses ( S0 ) sans tronc saphène au niveau de la cuisse : dans 55 % des cas elles sont associées à un reflux majeur sur jonction fémoro variqueuse résiduelle ( C+) et dans 31 % elles sont associées à un reflux mineur (C0 7) de type néojonction fémoro variqueuse microscopique.
  • Dans 118 cas , la saphène résiduelle a un diamétre de 3 à 15 mm et une longueur de 15 à 70 cm. 60 saphène s ( S+ 1 ) communiquent avec la fémorale par l’intermédiaire d’une branche résiduelle de la crosse.
  • 16 saphène s ( S+ 2) communiquent avec la veine fémorale par l’intermédiaire de macro vaisseaux tortueux de 2 à 10 cm assurant la jonction entre la saphène et la veine fémorale de deux façons :

8 fois par un reflux majeur sur une branche résiduelle ( C+ )

8 fois par un reflux mineur de type angiogénétique ( C0 7)

  • 25 saphène s (S+ 3) souvent plus basses sur la cuisse ne communiquent avec aucune source de reflux. Aucun contact n’est visible entre la saphène résiduelle et la veine fémorale au niveau de l’ancienne crossectomie.16 s’accompagnent d’un reflux majeur (C+) et 9 d’un reflux mineur (C0 7).
  • 10 saphène s sont alimentées par des varices honteuses externes génitocrurales ,
  • 7 sont alimentées par une perforante haute de cuisse.

Corrélation entre type de reflux et type de saphène

Tableau II

Les associations retrouvées sont par ordre de fréquence.

  • reflux résiduel + saphène résiduelle C+ / S+ 85 (43 %)
  • reflux résiduel + varice diffuse C + / S 0 52 (26%)
  • absence de reflux inguinal + varice diffuse C0 / S0 34 (17 %)
  • absence de reflux inguinal + saphène résiduelle C 0 / S+ 26 (13 %)

Préférentiellement C+ sera associé à S+ (62 % ) et C0 à S0 ( 57 %).

Corrélation entre le type de récidive et le délai de réintervention

Tableau III

L’intervalle entre l’intervention et la récidive varie de 1 é 41 ans, l’analyse des courbes en fréquence cumulées des patients réopérés montre que celles-ci sont semblables pour les différents paramétres de la récidive avec un décalage de temps.

50% des patients présentant un type C0 S+ sont réopérés 9 ans aprés et 75% 15ans après.

50%des patients présentant un type C+ S+ sont réopérés 10 ans apréset 75%20 ans après.

50% des patients présentant un typeC0 S0 sont réopérés 11ans aprés et 75% 19ans après.

50% des patients présentant un type C+ S0 sont réopérés 13ans aprés et 75% 19ans après.

DISCUSSION

De cette étude se dégage l’idée qu’il existe deux types de récidives . 1°) des récidives de type hémodynamique o le reflux inguinal résiduel et la saphène résiduelle acceptrice du reflux sont intriqués. 2°) Des récidives de type angiogénétique o les reflux sont mineurs. En effet , la persistance d’un reflux inguinal important s’accompagne d’une saphène acceptrice du reflux dans 62 % des cas, et la persistance d’une saphène résiduelle refluante s’accompagne d’un reflux inguinal majeur dans 76 % des cas.

Dans les récidives de type hémodynamique les deux hypothéses sont : ou le reflux résiduel inguinal développe , entretien et détériore la saphène résiduelle ou c’est le reflux dans la saphène résiduelle qui par aspiration aggrave et développe le reflux résiduel inguinal .

Parmi les 41 saphène s résiduelles sans connexion directe avec le reflux (S+ 2, S+ 3) 58 % sont associées à un reflux majeur et 41 % à un reflux mineur alors que dans les seules néojonctions fémoro saphène s macroscopiques (S+ 2) la proportion est la m me . D’autre part dans les reflux résiduels majeurs il y a deux fois moins de néojonctions fémoro saphène s que de saphène s isolées 6 % pour 12 %, ce qui montre que les phénoménes d’angiogénése sont indépendants des phénoménes de pression. Si la saphène a été enlevée complétement, la récidive est alimentée dans plus de la moitié des cas par un reflux inguinal important 55%, et dans 31% des cas par un reflux mineur (C0 7) Tab I. Dans les saphène s résiduelles branchées directement sur le reflux inguinal, les reflux résiduels majeurs sont plus fréquents. 21 % sont en connexion avec des crosses intactes, et 4 % avec des branches de faible débit. Les saphène s résiduelles développant une néojonction fémoro saphène macroscopique (S+ 2) sont en connexion avec des reflux inguinaux moyens , alors que les saphène s résiduelles isolées ( S+ 3 ) sont associées à des reflux majeurs importants , ce qui montre que l’angiogénése est un phénoméne qui se développe en dehors des effets de pression.

Si l’étude de l’intervalle entre les deux interventions ne traduit pas le délai d’apparition de la récidive , cet intervalle est un élément objectif de comparaison des différents types de récidives. Il faut , par ailleurs, tenir compte de la moins bonne tolérance clinique de certaines formes de récidives.Si, sur un reflux résiduel inguinal on laisse en plus une saphène , on raccourcit le délai de reprise de 3 ans . Si malgré une bonne crossectomie on laisse une saphène on raccourcit la reprise de 2 ans, cela souligne le r le important de la saphène résiduelle dans la récidive. Par contre, curieusement, laisser un reflux inguinal en plus d’une saphène résiduelle rallonge plut t le délai de réintervention, et si sur une saphène ctomie compléte on réalise une crossectomie compléte le délai raccoucit de 2 ans. Cette discordance s’explique par le fait que ces deux derniers types de récidives sans saphène avec reflux mineur sont de type angiogénétique et certainement moins bien tolérés cliniquement par la diffusion variqueuse inesthétique et souvent douloureuse.Tab IV

CONCLUSION

Cette étude permet de montrer le rôle majeur de la saphène interne résiduelle dans la pathogénie de la récidive, rôle important où sont intriqués les phénoménes de réservoirs accepteurs du reflux sus jacent et des phénoménes d’aspiration ascendante de reflux. Ces récidives de type hémodynamique sont souvent issues d’une faute chirurgicale, elles sont étonnament bien tolérées dans le temps et logiquement de traitement chirurgical.

L’angiogénése ou néojonction fémoro saphène microscopique ne semble pas influencée par les effets de pression, c’est un phénoméne de cicatrisation indépendant des pressions de reflux, ces types de récidives sont moins bien tolérées cliniquement et le traitement chirurgical devrait s’effectuer dans des conditions maximum d’atraumatisme.

REFERENCES

  1. RILVINS S. The surgical cure of primary varicose vein. Br. J. Surg. 1975 ; 62 : 913-17
  2. ROYLE JP. Recurrent varicose vein . World J. Surg . 1986 ; 10 : 944-53
  3. DAVIES GC. The Lothian surgical audit . Medical Audit News 1991; 1 : 26-7
Date 1995
Auteurs In: Negus D., Jantet G., Colleridge-Smith PD., eds, Plebology 95, Supl. 1, London, Springer- Verlag, 1995 : 164 -168 D. CRETON EC. Ambroise Paré, rue Ambroise Paré, 54100 F-NANCY